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Le manoir du Rocher,
appelé aujourd'hui le Haut-Rocher, est édifié sur une éminence rocheuse
dominant le vallon de l'Ouette. Il regarde à l'ouest, le village de
Nuillé-sur-Ouette. Le Rocher se compose de trois bâtiments anciens distincts
et d'une adjonction moderne: le manoir, une annexe contiguë appelée
boulangerie ou cellier une grange ancienne (appelée estrage dans un aveu de
1452), prolongée vers l'est au XIXe siècle. Le manoir a retrouvé une
couverture de bardeaux de chataignier qui était fréquente jusqu'au XVIIIe
siècle, époque où ils ont cédé la place aux ardoises. Il est orienté selon
un axe longitudinal sensiblement nord-sud. Sa façade, sur laquelle s'adosse
la tour d'escalier et s'ouvrent ses principales fenêtres, est tournée vers
l'est. La tour d'escalier a été édifiée après le manoir car lors des travaux
de restauration, on a retrouvé le collage sans liaison entre les deux
parties du bâtiment. Les fenêtres étaient défendues par de fortes grilles
dont subsiste celle de l'ouverture gauche. Au premier étage, les ouvertures
présentent un décor sculpté de grappes de raisins, de feuillages, de têtes
humaines et animales pour l'une; frise d'animaux et andouillers encadrant
une tête humaine, pour l'autre. Ce décor évoque les fruits de la terre et la
chasse, pourvoyeuse de viande en cette région située, jadis, en lisière de
la grande forêt de Charnie. Deux lucarnes en tuffeau, remontées lors des
travaux de restauration, surmontent la façade.
Le pignon sud présente au rez-de-chaussée et à l'étage deux demi-croisées
hautes et étroites. En partie haute, deux petites fenêtres encadrées de gros
moellons éclairent et ventilent le grenier comme sur le pignon nord opposé.
La façade ouest est percée, au rez-de-chaussée, d'une croisée à meneau et
traverse éclairant la salle, et d'une demi-croisée donnant de la lumière à
une chambre aménagée lors des travaux de la seconde moitié du XVe siècle.
Sur cette façade ouest s'appuie la tour carrée des latrines qui était rune
dès le XIXe siècle. Elle a été remontée lors des travaux de restauration,
sur ses fondations encore en place et devant les deux portes du premier
étage qui desservaient les deux chambres hautes. C'est un des rares
exemples, en Mayenne, de latrines adossées au bâtiment. Il en existe au
petit logis de Saint-Brice et à la Grande Courbe à Brée où elles sont
décalées et desservies par une galerie. Les bâtiments sont construits avec
une maçonnerie de moellons où se mélangent des pierres d'origine locale,
granit gris, diorite vert foncé, grès dur et fin, hourdées au mortier de
chaux et sable. Un enduit peu épais recouvrait l'ensemble des murs
extérieurs.
Le rez-de-chaussée du manoir comporte deux salles: la plus grande dotée
d'une cheminée monumentale est éclairée par une grande fenêtre à meneau à
l'est, une autre à l'ouest et une sur le pignon sud, à droite de la
cheminée; la plus petite a perdu sa cheminée, elle comportait une souillarde
sous les fenêtres est et une demi-croisée à l'ouest. À l'origine, avant les
travaux de la seconde moitié du XVe siècle, ces deux salles n'en faisaient
qu'une avec une cheminée à chaque pignon. La petite salle communiquait
directement par une porte avec le cellier et la boulangerie qui conserve sa
grande cheminée. L'escalier à vis de Saint-Gilles qui mène aux étages est
constitué d'un poteau vertical, noyau circulaire en chêne d'une seule
hauteur sur trois niveaux et de marches en chêne massif, finement équarri,
fixées sur le noyau par tenons et mortaises chevillés. L'extrémité opposée
de chaque marche est scellée dans le mur de la tour Cette partie est
soigneusement taillée en épaulement ce qui renforce sa solidité et son
assise; elle est amortie par une fine moulure. Le premier étage est occupé
par deux grandes chambres de dimensions presque semblables, chacune est
dotée d'une cheminée monumentale, d'une fenêtre de la seconde moitié du XVe
siècle très moulurée, aux embrasures profondes, dotées de sièges en pierre
et d'une porte débouchant dans les latrines. Ces deux pièces sont séparées
par une cloison au robuste colombage reposant sur une poutre indépendante du
solivage du plancher du rez-de-chaussée. Au-dessus, les combles, de taille
importante, étaient divisés en deux parties à peu près égales par une
cloison à colombage qui a conservé son ossature. La charpente est encore
dans son état d'origine. Tous les bois utilisés en charpente et en solivage
sont en chêne débité et équarri à la hache; aucune trace de sciage
n'apparaît nulle part, ce qui confirme l'ancienneté de sa mise en œuvre,
avant le XVIe siècle.
La grange avait à l'origine, l'apparence d'une halle en bois à trois
travées, ouverte sur quatre côtés. Elle a été, par la suite, fermée et munie
d'une grande ouverture charretière. Le manoir du Rocher est un édifice dont
la construction principale remonterait au XIVe siècle. Il aurait été remanié
entre 1451 et 1480 (tour d'escalier et deux fenêtres au premier étage). À
partir de 1730, il devient une exploitation agricole et le reste jusqu'en
1987. Cité dans le cartulaire de l'abbaye de la Couture du Mans dès 1350,
"l'hébergement" du Rocher était un fief et domaine mouvant de La Ramée,
prieuré de La Chapelle-Rainsoin. En 1452, puis 1506, Macé de Brée, écuyer,
puis Jean de Brée définissent le contenu de leur fief. C'est à eux que l'on
doit la tour d'escalier, la boulangerie et la grange en pierre (à l'origine
grande halle sur poteaux). Après la famille de Brée, le Rocher entre en
possession des Couesmes (1542-1576), des Vergers (1595), d'une lignée de la
famille très étendue des Duchemin (1681): René Duchemin des Auvais, puis
Ambroise Duchemin et Jacques Duchemin des Loges (1774), et jusqu'à la
Révolution Jean Carré de la Paumardière. Les derniers exploitants agricoles
ont quitté le Rocher en 1987 et le manoir racheté en 1989 par les actuels
propriétaires, a été remis en état pour lui restituer l'aspect qu'il avait.
(1)
manoir du Haut Rocher 53210 Nuillé-sur-Ouette, propriété privée, ne se
visite pas.
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