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Le château situé dans le hameau
de Bouchereau, autrefois "Bourg-Charreau", doit être le siège d'une
seigneurie locale depuis au moins les XIIe ou XIIIe siècles, si l'on en
croit quelques vestiges architecturaux subsistant. Il s'agit d'un fief tenu,
"à hommage lige à dix soulz", du "chastel, chastellenie et terre de Thors"
(commune située à quelques kilomètres au sud de Matha). Ce n'est qu'au début
du XVe siècle que "l'hébergement de Bourg Chareau" apparaît dans les textes.
Un aveu et dénombrement du 8 novembre 1419 indique que l'ancien propriétaire
du domaine est "feu Jehan Rogder, par le temps qu'il vivait seigneur de
Bourg-Chareau", et que les héritiers sont les deux filles de ce dernier,
"Marguerite et Marie Rogières". L'hommage est dans ces conditions rendu par
un tuteur, Léonnet de Latre, certainement l'époux de l'une des deux soeurs.
En 1419, Bouchereau est un petit domaine essentiellement viticole et,
concernant les habitations, Léonnet de Latre déclare à son suzerain, outre
le "coulombier" et quelques maisons situés dans le hameau, son "hébergement
de Bourg Chareau avec la sale et tour ancienne, assis d'un costé jouxte la
grant sale neuve et l'append tenant à ladite sale, et d'autre costé fiert au
grant chemin public par lequel l'on voit de Maconville à Nevic". Le 27
février 1433, Léonnet renouvelle, exactement dans les mêmes termes, son
dénombrement à "Yzabeau de Vivonne, dame de Thors" mais il se dit cette
fois, en propre, "seigneur de Bourg-Charreau". Une centaine d'années plus
tard le domaine appartient encore à la famille de Lastre, en la personne de
Antoine, écuyer, marié en 1528 à Catherine de Livenne et qui vit toujours à
Bouchereau en 156l3. Les de Lastre porte "d'azur à trois tours crénelées
d'argent nervurées de sable deux etun". Le fils d'Antoine, Jean, épouse
Louise de Saint-Amand en 1574 et c'est certainement lui qui va réaliser vers
le début du XVIIe siècle d'importantes reconstructions pour rendre l'ancien
"hébergement" de Bouchereau plus à même de supporter l'assaut de petites
troupes en ces temps de guerres civiles. Le 9 mai 1598 il obtient en effet
la permission "de battir un château au dit lieu deBoucheraud, à la charge de
tenir à foy et homage dudit seigneur et dame de Thors". Ce document montre
bien que le logis avait alors en cette fin du XVIe siècle, perdu tout
élément défensif, la "tour ancienne" citée en 1419 pouvant alors être tombée
en ruines, pour que le seigneur du lieu soit contraint de requérir
l'autorisation de son suzerain avant de réaliser de nouveaux travaux de
fortifications. Les de Lastre resteront maîtres de Bouchereau jusqu'à la
période révolutionnaire et leur filiation est assez bien connue grâce à des
contrats de mariage qui sont parfois "passés au logis noblede Bouchereau".
Mentionnons par exemple Jean de Lastre, écuyer, "seigneur de Bouchereau et
de la Touche-Marteau" qui paye en 1698 une imposition de 800 livres "pour le
Bouchereau", ou bien Jean-Nicolas, lieutenant de cavalerie au régiment de
Chartres, qui est tué à Saint-Jean-d'Angély, le 31octobre 1758, au cours
d'un duel. Le 7 novembre 1786, Charles-François de Lastre, chevalier,
seigneur de Bouchereau et baron du Cluzeau-Bignay, signe une procuration à
son épouse Marie-Françoise de Lestang pour qu'elle puisse vendre "le fief et
seigneurie de Bouchereau et les biens nobles et roturiers qu'il possède en
la paroisse de Marqueville et dans ses environs". Les de Lastre, qui
habitent désormais le château de Bignay, vont donc se désaisir du domaine de
Bouchereau au profit de la famille Arnaud vers la fin du XVIIIe siècle. Dans
les années 1920, Bouchereau appartient aux Reveillaud, héritiers des Arnaud,
puis à M. Caillé. Ce dernier revend en 1942 la terre à Célestin Jobet qui le
cède en héritage le 25 février1948 à Pierre Jobet, père de l'actuel
propriétaire, passionné des vieilles pierres et qui va réaliser les
premières restaurations sur l'édifice. A l'aplomb de cette lucarne et
entre les deux contreforts les plus rapprochés, la porte d'entrée du logis
est par contre peut-être plus tardive (XVIIIe ou XIXe siècle), avec son
chambranle à fasces et crossettes, son,encadrement de pilastres toscan et
son entablement aux moulures assez sèches. Quelques vestiges situés dans la
moitié ouest des façades dénotent cependant la haute ancienneté de
l'architecture. Il s'agit d'abord, au rez-de-chaussée et près de l'angle
sud-ouest, d'une meurtrière d'éclairage ornée d'un chanfrein et dont le
linteau est délardé en mître. A l'étage ensuite existent, sur la façade sud
(quart ouest) et au milieu du mur-pignon occidental, deux baies murées
d'origine, constituées chacune de deux lancettes géminées qui pouvaient être
séparées par une colonnette et dont les linteaux sont délardés soit en arc
brisé soit en trilobé. Les éléments défensifs du logis de Bouchereau
consistaient en deux échauguettes placées aux angles de la façade
méridionale. Celle du sud-est s'est écroulée lors de la tempête de 1935 et
elle était semblable à celle qui subsiste, au sud-ouest. Construite en grand
appareil, cette dernière est cylindrique et repose sur les contreforts
d'angle par l'intermédiaire d'un culot mouluré de quarts-de-rond. Elle est
percée de fines fentes de tir et, en partie basse, de trous pour le passage
des volatiles. En effet, l'intérieur de l'échauguette, couvert d'un toit
d'ardoise en poivrière, servait non seulement de pièce de guet mais aussi de
pigeonnier grâce à l'installation de trous de boulin globulaires en terre
cuite, maçonnés entre eux. Ces échauguettes ont été édifiées au moment de la
remise en état de l'ancien donjon, sans doute arasé au cours des guerres de
Cent Ans, et elles pourraient bien remonter aux années 1598, date de
l'autorisation de fortifier accordée au seigneur de Bouchereau. Le
couronnement de la façade sud est peut-être contemporain de cette campagne
et il se compose de dalles de pierre en surplomb, formant corniche,
aujourd'hui recouvertes par la couverture en tuile canal mais qui devaient
primitivement faire office de chéneau puisque deux départs de gargouilles
sont encore nettement visibles. La façade nord du logis, à l'intérieur des
dépendances est fortement masquée par des structures récentes mais on peut y
déceler quelques ouvertures murées et des départs de voûtes appareillées qui
montrent que la construction se poursuivait de ce côté, peut-être dès
l'origine. L'ancien donjon pouvait alors avoir été du type de celui de
Montbron, avec un mur de refend longitudinal qui le partageait en deux
salles voûtées. L'accès le plus ancien du logis se situe dans le bas du
mur-pignon ouest, aujourd'hui camouflé par un appentis. Il s'agit d'une
large porte en arc plein cintre, à impostes, surmontée d'une baie
rectangulaire. L'ébrasement intérieur est recouvert de deux séries de
poutres de bois, une pour la porte, l'autre pour la fenêtre. Des traces de
reprises montrent que cette ouverture a été pratiquée après coup, peut-être
encore une fois lors des réaménagements fin XVIe début XVIIe siècle, et
qu'il n'existait à l'origine à cet endroit qu'une meurtrière d'éclairage
dont on aperçoit encore, au dessus de la fenêtre, la partie supérieure, avec
linteau délardé en mitre, tandis que l'ébrasement intérieur était couvert
par un linteau sur coussinets. L'intérieur se compose de deux blocs
distincts, qui se différencient parfaitement au niveau du rez-de-chaussée.
La moitié ouest, d'abord, est une grande salle, vestige de l'ancien donjon.
Elle est dotée d'un beau berceau appareillé, en arc brisé, consolidé à peu
près au tiers de sa longueur par un épais doubleau à l'aplomb duquel un mur
de refend, muni d'une cheminée, a été construit postérieurement. La voûte
est percée, contre le revers de la façade ouest, d'une trappe rectangulaire
qui permettait une communication avec l'étage. Le mur oriental de la salle
est percé en son milieu d'une fenêtre rectangulaire à couvrement de poutres
de bois tandis qu'au dessus restent visibles les vestiges, murés, d'une baie
romane. C'est donc bien à cet endroit que se terminait la construction
primitive, même si ce mur ne fait plus aujourd'hui qu'environ un mètre de
largeur. La moitié orientale du logis semble donc avoir été rajoutée,
peut-être au XVIIIe siècle, dans un esprit architectural homogène avec la
partie existante (moyen ou petit appareil, contreforts plats),excepté en ce
qui concerne l'épaisseur des murs et le côté Est, en moellon. Cette
hypothèse implique de voir en î'échauguette sud-est, aujourd'hui disparue,
soit une copie tardive, soit un remploi d'un élément XVIe XVIIe siècle.
L'intérieur n'a reçu aucun voûtement mais on profita de cet agrandissement
pour faciliter la distribution verticale au moyen d'un solide escalier en
bois suspendu, tournant à gauche et orné de fins balustres tournés, qui fut
aménagé entre l'ancienne façade Est et un mur de refend. Cet escalier,en
ormeau, a été restauré avec soin et respect par Pierre Jobet. Les pièces
carrées situées dans cette partie Est du logis, comporte une décoration
assez récente. Au rez-de-chaussée, il s'agit de motifs stuqués de style
Empire, sur la petite cheminée et en couronnement des murs. La chambre de
l'étage possède une grande cheminée en pierre à jambages courbes et une
alcôve avec penderie, ménagée au moyen d'une cloison ornée de panneaux
rectangulaires dans le haut et à moulures légèrement chantournées dans le
bas. La charpente au dessus de cette portion de bâtiment est des plus
simple, à panne au dessus de la cage d'escalier et à ferme classique, munie
d'aisseliers, au dessus de la chambre. Deux des trois pièces de l'étage,
situées dans la moitié occidentale du logis de Bouchereau, ont gardé des
éléments parfois important de leur ancienne disposition. La chambre
centrale, d'abord,contient sur le mur ouest une élégante cheminée du XVIIe
siècle dont le manteau peint en faux-marbre, est abondamment mouluré, sur le
chambranle et, après un étranglement, sur la corniche à larmier du linteau.
Le couronnement de la hotte droite reprend le même corps de moulures que la
corniche précédente. La face de la hotte, bordée de rinceaux peints, est
décorée d'un panneau dont le couronnement cintré est encadré par deux
écoinçons en pointes de diamant, le tout en trompe-l'oeil. La peinture
centrale représente dans un paysage, avec château imaginaire en
arrière-plan, une scène dramatique : une femme échevelée en robe, se
précipite sur un homme couché, habillé d'une tunique à l'antique, et se fait
transpercer le coeur par une épée dressée qui semble fichée dans le sol. De
nombreux repeints sont reconnaissables, sur tout l'encadrement en
particulier, et un vernis brillant a été passé sur l'ensemble des pigments
il y a une vingtaine d'années. De part et d'autre de la cheminée règne un
lambris de demi-revêtement, en bois cirés, avec panneaux à motifs losanges.
La chambre ouest ensuite, renferme sur le mur oriental, une cheminée
identique à la précédente, dans les moulures comme dans la composition
peinte, qui ici n'a pas été restaurée. La seule différence réside dans la
forme du panneau central de la hotte, rectangulaire à angles abattus, qui
contient encore un paysage avec château et personnages. L'ensemble des murs
est cette fois recouvert de lambris de hauteur non peints. De part et
d'autre de la cheminée, les panneaux losanges ou à motifs rayonnants,
s'organisent en deux registres, autour de deux portes de communication et,
au dessus, autour de trumeaux identiques à celui de la cheminée de la
chambre centrale. Le trumeau de droite contenait une peinture sur bois,
aujourd'hui déposée, qui représente le même type d'architecture et de
paysage que celui des cheminées décrites précédemment. Les boiseries des
trois autres murs de la chambre sont disposées selon trois registres
horizontaux. Celui du bas, à niveau d'appui, et celui du couronnement,
surmonté d'une petite corniche moulurée, sont de même hauteur et composés de
façon similaire, par une alternance de panneaux étroits et de panneaux
larges,sculptés de motifs en losange, en triangles rayonnants ou en damier,
dans le style du XVIIe siècle. Le registre central de lambris, qui a
peut-être remplacé au XIXe siècle des tapisseries disparues, est beaucoup
plus simple avec sa juxtaposition régulière de trois niveaux de panneaux
rectangulaires. Au milieu du mur nord, une porte murée permettait de
communiquer avec une partie du logis aujourd'hui détruite et elle est
surmontée d'un étonnant trumeau en bois sculpté d'un damier de pointes de
diamant. Enfin, le plafond de cette pièce est également lambrissé et une
combinaison de baguettes moulurées, encore conservées au niveau d'un
baldaquin mais dont seule l'empreinte subsiste ailleurs, dessinait de grands
motifs en losange ou en cercle.
Éléments protégés MH : le château, y compris son décor de lambris à l'étage
: inscription par arrêté du 14 avril 1997.
château
de Bouchereau 17490 Macqueville, propriété privée, ne se visite pas.
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