|
D'après l'abbé d'Expilly, la paroisse de
Suze-la-Rousse, qui dépendait alors du diocèse de Saint-Paul-Trois-Châteaux,
du parlement de Grenoble, de l'Election de Montélimar, était une des plus
belles terres du Dauphiné. Marguerite des Baux l'apporta en mariage à Hugues
de Saluces, seigneur de Montjoy. Leur fille, Antoinette de Saluces, étant
veuve de Henri, baron de Sassenage, se remaria, en 1526, à Louis de la
Baume, gentilhomme du Dauphiné, à qui sa mère donna la seigneurie de Suze.
Son fils, Pierre de la Baume, fut père de Guillaume et aïeul de
Louis-François, en faveur duquel la seigneurie de Suze fut érigée en comté,
en 1572. Celui-ci fut nommé, en 1578, gouverneur et amiral de Provence, et,
en 1581, chevalier de l'ordre du Saint-Esprit. Il mourut, en 1587, et fut
père de Rostaing, qui, de Catherine de Grolée de Bressieu, sa seconde femme,
eut Anne de la Baume, comte de Suze, marié à Catherine de la
Croix-de-Castries, mère de Joachim-Gaspard de la Baume, comte de Suze,
marquis de Bressieu, qui épousa, en 1680, Marthe d'Albon, et fut père de
Louis-François de la Baume, comte de Suze et de Rochefort, marquis de
Bressieu, mort en 1746. Celui-ci avait eu de Marie de Rostaing-du-Vauchet,
qu'il avait épousée en 1709, Louis-Charles de la Baume, comte de Suze et de
Rochefort, marquis de Bressieu, etc. Le plus illustre d'entr'eux, a été
François de la Baume, comte de Suze, gouverneur et amiral de Provence, etc.,
que nous avons mentionné plus haut: "Sa carrière militaire, dit M. Louis de
Laincel, fut signalée par cinquante-quatre combats, dans lesquels il paya de
sa personne, et les protestants n'eurent pas de plus redoutable adversaire.
Le baron des Adrets, irrité des revers que les armes heureuses de la Baume
lui avaient fait essuyer, le défia en combat singulier La Baume, vainqueur,
avait étendu à ses pieds son rival, percé de deux coups d'épée, et il lui
demanda ce qu'il ferait, en pareille occurrence. Je t'achèverais, répondit
le sanguinaire des Adrets. La Baume, qui, malgré la violence des mœurs de
son époque, aurait cru commettre une lâcheté, en tuant un ennemi sans
défense, lui fit donner, avec la plus généreuse sollicitude, les soins que
réclamait la gravité de ses blessures. Blessé au siège de Montélimar,
qu'avait secouru Lesdiguière, il fut mortellement frappé en 1587.
Recueillant alors ses forces mourantes: Allons, ma Grise dit-il à sa jument,
allons mourir à Suze ! et le vieux compagnon de ses batailles, couvert
également de blessures, le transporta sur les bords du Lez, où le maître et
son fidèle serviteur rendirent le dernier soupir".
La maison de la Baume-Suze est éteinte depuis le début du XIXe siècle. Tout
porte à croire que le château, commencé et très avancé, durant le XIVe
siècle par les Saluces, fut terminé au XVIe siècle, par les comtes de la
Baume, après avoir été notablement modifié par eux à l'intérieur. C'est ce
que, a défaut de document historique précis, semble indiquer la physionomie
de l'édifice, considéré à ce double point de vue. En effet, la masse
imposante qu'il présente extérieurement, avec ses tours cylindriques à
mâchicoulis, engagées dans le corps du bâtiment; les deux tours, moins
hautes, mais plus accentuées et fort bien conservées, qui flanquent la
principale porte d'entrée avec pont-levis; les fossés, encore très
apparents, qui environnaient et défendaient le château; tout cela accuse une
date de construction qu'on ne saurait fixer en deçà du XVe siècle. Il en est
autrement de l'intérieur, qui a été remanié plusieurs fois. La partie la
plus ancienne qu'il offre aux regards de l'observateur, est sa magnifique
cour d'honneur, de forme carrée, sur les faces de laquelle la Renaissance a
prodigué en bustes, en entre-lacs, en corniches, en méandres, en
rondes-bosse, en médaillons, en frises et en rinceaux capricieux, les motifs
les plus riches et les plus brillants de son magique ciseau. Les pilastres
de chaque étage sont chargés d'arabesques délicatement fouillées, et de
toutes ces inimitables parures écloses du génie fécond de Primatice.
L'escalier se développe sur de larges et harmonieuses proportions, et les
salles de réception, surtout, sont remarquables par le bon goût de leur
décoration ainsi que l'entente de leur distribution. Il faut ajouter que les
réparations entreprises, depuis quelques années, par le propriétaire actuel,
ont été exécutées avec une parfaite intelligence des conditions de l'art.
Sans doute, comme le remarque M. le marquis de Laincel, cet important
château de Suze n'est pas venu jusqu'à nous, à l'abri de toute insulte. Le
temps l'a frappé de son empreinte, et les révolutions surtout ne lui ont pas
épargné les mutilations. Les créneaux qui autrefois en couronnaient le faite
et se détachaient en dentelures mauresques sur l'azur du ciel, ont été
ruinés, et les détails de l'ornementation ont été déshonorés de la manière
la plus barbare. Néanmoins, l'ensemble de ses proportions et l'imposante
allure de sa masse sont encore du plus bel effet. Ce qu'il y a de plus
remarquable dans ce château, c'est sa forme et sa disposition extérieure,
qui, telles que nous venons de les décrire, présentent un spécimen à peu
près complet du château du moyen-âge, dont les types, principalement dans le
Midi, deviennent rares de jour en jour. Sous ce rapport, il est digne de la
plus sérieuse attention, et il pourrait fournir matière à d'utiles et
d'intéressantes études. L'Album du Dauphiné en a donné un dessin très exact.
Un peu élevé, au couchant, au-dessus de la jolie rivière du Lez, et borné au
levant par une vaste garenne qui lui tient lieu de parc, il se détache en
silhouette avec beaucoup de grandeur et de sévérité. Parmi les souvenirs
historiques qui se rattachent au château de Suze, on cite le passage de
Charles IX, roi de France, qui s'y arrêta lors de son voyage d'Avignon, avec
Catherine de Médicis, au mois de septembre 1563. Notons que la dernière
représentante de la lignée familiale, la Marquise de Bryas, mourut sans
héritier en 1958, et légua le château à une association des "Apprentis
orphelins d'Auteuil". Faute d'argent, l'association le vendit aux enchères
en 1963 et le conseil Général s'en porta acquéreur.
Éléments protégés MH : le château et son parc : classement par arrêté du 27
février 1964.
château de Suze la Rousse 26790 Suze-la-Rousse, tél. 04 75 04 81 44, ouvert
au public, visites tous les jours de 9h30 à 11h30 et de 14h à 17h30 (18h en
juillet et août). Fermé du 1er novembre au 31 mars.
Ce site recense tous les châteaux de France, si vous possédez des documents
concernant ce château (architecture, historique, photos) ou si vous
constatez une erreur, contactez nous. Licence photos©webmaster
B-E : les
photos ci-dessous sont interdites à la publication sur Internet, pour
un autre usage nous contacter. A voir sur cette page "châteaux
de la Drôme" tous les châteaux répertoriés à ce jour
dans ce département. |
|