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Deux seigneuries se partageaient la ville de Condé au
Moyen-Age, la seigneurie gagère et la seigneurie propriétaire, dite de
Bailleul, qui releva des familles de Condé Bailleul Moriamez jusqu'en 1391,
puis de La Hamaide jusqu'en 1485, de Roghendorf en 1531, de Lallaing à
partir de 1559 et enfin de Croy à partir de 1608 et jusqu'à la Révolution.
Un premier château dépendant de cette seigneurie a probablement préexisté,
le corps de bâtiment médiéval encore en place a été construit pour Jean de
la Hamaide dans les années qui précèdent la date de 1411, autrefois portée
en façade avec les armes de cette famille sur un écu toujours visible mais
dont les reliefs ont été bûchés. Dès la fin du XVe siècle cette résidence
est qualifiée d'hostel. En 1544, Christophe de Roghendorf réalise une
orangerie et des jardins s'étendant jusqu'au rempart médiéval mais dont
l'organisation n'est pas connue. Au XVIe siècle que sont bâties l'aile de la
rue de la Bibliothèque et celle de la rue de la Cavalerie, qui poursuivent
le corps de bâtiment médiéval. Dans les années 1640, le couple Jeanne de
Lallaing et Jean de Croy fait modifier l'aile de la rue de la Cavalerie,
dont la façade arrière porte les armoiries des Lallaing et la date de 1643.
Dans cette aile, les plafonds conservés attestent une datation de la
deuxième moitié du XVIIe siècle, et un grand escalier, dit de Louis XIV en
souvenir du séjour du roi en 1691, y est édifié à la fin du siècle. La
famille de Croy fait aussi construire les trois ailes intérieures en retour,
délimitant ainsi trois cours ; l'aile en retour nord est disparaît des plans
entre 1727 et 1754. Au XVIIIe siècle, le château est régulièrement habité
par les Croy ; Emmanuel de Croy, futur duc et maréchal, y naît. L'édifice
abrite plusieurs appartements, les archives de la famille, des cabinets de
curiosités ; la bibliothèque est conséquente, l'aile qui l'abrite fait
l'objet d'un agrandissement de six pieds aux dépends de la rue adjacente, à
laquelle elle donne son nom en 1784. Les appartements princiers se situent
dans l'aile de la rue de la Cavalerie, l'appartement du Roy cité dans
l'inventaire de 1745 s'étendait au premier étage du corps de logis médiéval.
En 1748-49 des réparations sont dirigées par l'ingénieur militaire Louis
Franquet, ingénieur en chef de la place de Condé : s'agit-il des percements
de la façade et du rehaussement du comble du corps de bâtiment médiéval, et
de la reprise des ailes, modifications dont le style atteste le XVIIIe
siècle? Est-ce alors que les tourelles reçoivent un niveau supplémentaire et
que disparaissent les mâchicoulis? Au jardin sont adjointes une orangerie et
une pépinière; on y pénètre depuis le passage traversant le château
médiéval, donnant accès à la cour d'honneur séparée du jardin par une
clôture. Les communs se répartissent autour des cours occidentales. En 1793,
il est déclaré bien national, le château est acheté le 24 vendémiaire an V
par le seigneur de Saint Moulin. Le mobilier est placé sous séquestre en
1793 et les manuscrits, les objets précieux, tableaux, estampes, envoyés à
Valenciennes, où ils sont rejoints par le contenu de la bibliothèque en
1796. En 1829, une ordonnance royale autorise la ville à acquérir divers
bâtiments avec dépendances. Un plan de 1841 montre l'organisation du jardin.
Deux actes de vente du 14 septembre 1883 entérinent la cession du château à
la ville par le seigneur Mention, des dépendances et des terrains qui,
précisait le procès de la séance du Conseil municipal du 28 décembre 1882,
représentent en superficie la neuvième partie de la ville, les terrains
libres derrière l'édifice, correspondant à l'emprise du jardin, sont cédés,
pour partie à l'administration des hospices dès 1884. Les anciens communs
qui constituaient la deuxième moitié, vers le sud-ouest, de l'aile de la rue
de la Cavalerie ont été cédés et transformés dès 1884. Le musée et la
bibliothèque fondée en 1874 sont installés vers 1890 dans le corps de logis
médiéval. Corps de bâtiment médiéval, à l'extrémité nord-ouest de la rue
de la Cavalerie, façade donnant sur la place Verte : de plan massé, flanqué
de quatre tourelles couvertes par des toits coniques (trois d'entre elles
sont en encorbellement), il est édifié en grès, de moyen appareil sur les
faces tournées vers la ville, en moellons sur l'arrière. Les voûtes décrites
plus loin sont aussi en grès. L'encadrement des ouvertures et les croisées
sont en pierre calcaire (pierre de Bavay ?). En façade principale, les baies
du rez-de-chaussée et du 1er étage sont closes par des châssis à petits
bois, celles du 2e étage, des fenêtres à croisées de pierre, étant par
contre articulées par des meneaux et traverses. La toiture à longs pans et
croupes brisés se termine par un égout retroussé qui repose sur des corbeaux
de pierre. Trois lucarnes en menuiserie à piedroits à volutes, couvertes par
une croupe débordante, s'ouvrent vers la place Verte. L'ensemble des
couvertures est en ardoise, à l'exclusion du côté vers place Verte, en
feuilles bitumées. Un passage couvert, pavé, traverse le rez-de-chaussée en
son centre. Voûté, dans sa section antérieure en berceau plein cintre puis,
dans sa section postérieure, en berceau brisé, il comporte un assommoir côté
place Verte et conserve le dispositif d'accrochage des vantaux de porte. Les
deux pièces du rez-de-chaussée, voûtées de berceaux plein-cintre, s'ouvrent
de part et d'autre dans le passage, l'une d'entre elles est la chambre du
portier de l'inventaire de 1745. Ce passage débouche sur ce qui est
maintenant une courette, vestige croupion de la cour d'honneur. L'accès à la
cave et aux étages n'est possible qu'à partir de l'arrière du bâtiment. Une
petite cave voûtée en berceau dont l'accès originel se faisait depuis la
cour s'étend sous une partie de l'arrière du bâtiment. Un escalier en vis
abrité par la tourelle ouest, la seule qui part de fond, assurait la
desserte exclusive des étages jusqu'au début du XXe siècle. Son emmarchement
est réalisé en pierre calcaire marbrière à l'exception du niveau d'accès au
comble, en bois. Les étages du bâtiment sont planchéiés. Le 1er étage est
composé de deux pièces principales et d'une antichambre (qui conserve les
corbeaux ayant supporté le plafond médiéval), ce qui pourrait correspondre à
la composition du troisième appartement cité dans l'inventaire de 1745. Le
2e étage abrite une unique et vaste salle à poutres apparentes, dont les
dimensions avoisinent 5 m en largeur et 14 m en longueur. Plusieurs couches
d'enduit recouvrent les murs. Une cheminée monumentale est adossée au
mur-pignon nord-est; la tourelle nord abrite les latrines saillant en
encorbellement au-dessus de la chaussée de la rue de la Bibliothèque. Les
tourelles (hors celle de l'escalier), dallées de carreaux de céramique
rouge, sont couvertes par des voûtes coniques.L'étage de comble est dallé de
carreaux de céramique.
L'aile correspondant aux actuels n° 35 et 37 rue de la Cavalerie comprend un
sous-sol partiel, un rez-de-chaussée et un étage de comble couvert par un
toit à longs pans d'ardoises. La façade sur rue, défigurée par l'application
d'un parement de briquettes jaunes, ne permet pas d'approche de la mise en
oeuvre architecturale, qui demeure cependant appréciable en façade arrière.
Sur un solin de pierre s'élève une maçonnerie de brique interrompue par les
encadrements de baies en pierre calcaire. La première travée côté cour (qui
correspond au pan de mur non revêtu du briquettes côté rue) a conservé la
lisibilité des dispositions de la première moitié du XVIIe siècle : une
porte au chambranle mouluré en pierre surmontée d'un fronton triangulaire
assez fruste, au-dessus de laquelle se développe une baie aux proportions
d'une porte-fenêtre. Des reprises sont cependant visibles. Depuis la fin du
XVIIe siècle, cette travée correspond à l'emplacement de l'escalier de Louis
XIV, distrait en 1912 de la distribution de la maison pour permettre un
accès plus commode au corps de logis médiéval abritant alors musée et
bibliothèque. Cet escalier en charpente, tournant à retours avec jour,
comporte une rampe d'appui à balustres plats. Il commande actuellement
l'accès à la cave du bâtiment médiéval et en dessert le 1er étage. Dans
cette aile, qui abritait semble-t-il l'appartement du Roy cité dans
l'inventaire de 1745, sont aussi conservés les plafonds à compartiments
recoupés par le cloisonnement intervenu lors de l'appropriation en
appartements au début du XXe siècle.
Au-delà du mur-pignon débordant, les n° 27 à 33 rue de la Cavalerie sont
bâtis dans la continuité des n° 35-37 et en reprennent le volume. Les n° 31
et 33 sont revêtus d'un enduit de ciment, les n° 27 et 29 montrent une
façade de brique, mais les façades arrière, dans lesquelles domine la
brique, comprennent aussi, au-dessus d'un solin de grès, des moellons de
grès et de la pierre calcaire blanche. Les percements ont été repris. Les
toitures à longs pans sont couvertes de tuile ou de matériau synthétique.
Une corniche de pierre blanche court du n° 27 au n° 33 tant sur les façades
avant qu'arrière. Le mur-pignon du n° 27 atteste bien une construction
ancienne, qui semble chronologiquement cohérente avec celle des n° 35-37.
L'aile de la rue de la Bibliothèque montre actuellement une façade résultant
des aménagements des années 1906-1908. Un enduit de ciment donnant
l'illusion d'un appareillage et d'une modénature de pierre dissimule la
brique. L'élévation, à travées, comprend un sous-sol, un rez-de-chaussée, un
étage carré et un étage en surcroît, au n° 1-3 (ce que ne prévoyait pas le
projet de l'architecte Lemaire en 1906), peut-être un 2e étage carré ou
aussi un étage en surcroît plus développé au n° 5. Le toit à longs pans est
couvert de tuiles et d'ardoises synthétiques. Les deux premières travées de
façade correspondent sur l'arrière à une élévation qui se raccorde de façon
pragmatique au corps de bâtiment médiéval ; un burguet, et une porte donnant
accès à un escalier demi-hors-oeuvre en vis, en charpente, prennent jour
dans la courette du corps de bâtiment médiéval. Ces travées ont été
restaurées, avec modifications des percements anciens, par l'architecte en
chef des Monuments historiques (1986). L'ensemble des façades arrière, très
dégradé, est élevé en brique avec encadrement des baies en pierre blanche ;
la corniche est ornée d'une frise de briques posées en dents de scie. Des
lucarnes à croupe débordante et piedroits à volutes gravés ponctuent la
toiture couverte en bacacier et matériau synthétique.
Éléments protégés MH : le château : classement par arrêté du 17 février
1904. Les immeubles accolés de part et d'autre au château : rue de la
Bibliothèque (façades et toitures sur rue et sur cour) ; rue de la Cavalerie
35-37 (façades et toitures sur rue et sur cour, l'escalier à balustres
conduisant à l'actuelle bibliothèque, les plafonds décorés du premier étage)
: inscription par arrêté du 3 juillet 1987, rectifié par arrêté du 19
février 1988.
château de Bailleul, 35, 37 rue de la Cavalerie et rue de la
Bibliothèque, 59163 Condé-sur-l'Escaut, tel. 03 27 40 01 62, musée et
bibliothèque
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