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Ce site a été occupé dès le Néolithique
comme l'atteste la présence d'un menhir à l'entrée de l'ensemble manorial.
D'autres pierres dressées ont pu servir à la construction du manoir au Moyen
Age. Cet ensemble à la fois résidence seigneuriale et exploitation agricole,
est situé à moins de deux kilomètres au nord-nord-est du bourg de Prat. Il
se trouve, "à la jonction des terres arables et des prairies", à proximité
immédiate de deux sources et d'un petit affluent du Jaudy qui alimentaient
son étang et ses viviers. Si il se situe à mi-chemin entre les villes de
Guingamp et de Lannion, le manoir est isolé dans la campagne ; on y accède
uniquement par l'ouest via le chemin de Prat à Mantallot puis en empruntant
l'allée d'honneur longue de 250 mètres et nommée "avenue" sur le cadastre de
1835. On relève cinq bâtiments sur ce dernier dont le logis principal
orienté vers l'ouest, la chapelle à l'ouest et le colombier au sud et, des
espaces délimités formant cours, pourpris, jardins, vergers et prairies. On
peut encore voir des éléments de l'entrée monumentale qui comprenait une
porte charretière et une porte piétonne. Le toponyme est "Coadélan" sur le
cadastre. On trouve aussi mentionné "Coatalay" sur la carte de Cassini
datant de la seconde moitié du XVIIIe siècle ou encore "Coëtelan" dans les
archives seigneuriales. Plusieurs noms de parcelles du cadastre font
explicitement référence à l'activité linière : des bassins destinés au
rouissage ont été répertoriés le long des cours d'eau grâce au cadastre
ancien. La seigneurie et le manoir de Coadélan ont vraisemblablement été
fondés dès le début du XIVe siècle par la famille Le Chevoir (le dénommé
Merien Le Chevoir est cité en 1365). Leurs armoiries ornent toujours la
bâtisse. Vers 1500, Rolland Le Chevoir épouse Jeanne Le Rouge (originaire de
Trébriant en Plestin) comme le montrent les armoiries de la cheminée dans la
grande salle.
En 1584, Lancelot III Le Chevoir décède en laissant une fille mineure et une
succession difficile... Guy Eder, sire de La Fontenelle, chef d'une bande de
brigands enlève la jeune héritière alors âgée de neuf ans. Il l’emmène dans
sa forteresse de l'île Tristan devant Douarnenez et finit par l'épouser vers
1594-1595. Le couple vient séjourner au manoir de Coadélan à plusieurs
reprises à la fin du XVIe siècle et le restaure. Guy Eder est finalement
exécuté le 27 novembre 1602 à Paris et sa tête envoyé à Rennes. Marie Le
Chevoir décède peu de temps après à l'age de 17 ans. Le manoir reste dans
les mains de la famille Le Chevoir jusqu'à la mort sans progéniture en 1667
de Vincent-Joseph Le Chevoir. A cette date, la seigneurie passe dans la
famille du Bouillé par mariage de Marie-Jeanne Le Chevoir avec René du
Bouillé. La famille du Bouillé-Turquant conserve le manoir de Coadélan
jusqu'à la Révolution. Ce sont les familles Le Corgne (au début du XIXe
siècle) et Kergariou qui deviennent ensuite propriétaires.
Le volume, les éléments stylistiques et la mise en œuvre permettent de dater
les parties les plus anciennes du manoir de Coadélan du XIVe siècle. Des
études architecturales et dendrochronologiques donnent une datation peu
après 1300 pour les poutres de chêne de la cuisine (vers 1305-1327) tandis
que la partie sud du logis et la salle basse datent des années 1362-1390. Le
logis se compose d'un bâtiment d’environ 35 mètres de longueur flanqué au
nord et au sud de deux tours. Au rez-de-chaussée, le manoir comprend, du
nord au sud, trois pièces : la cuisine (doté d'un passe-plat double), la
salle basse et la chambre froide sur cave semi-enterrée ; à l'étage : une
chambre de service, la salle haute sous charpente apparente (dotée d'une
grande cheminée et d'une crédence) et la grande chambre. La porte d'entrée,
qui débouche à l'ouest à l'extrémité de la salle basse, est flanquée par la
tour d'escalier en vis hors-œuvre. La façade orientale du manoir, tournée
vers l'étang, comporte un second escalier en vis distribuant chaque niveau,
de la cave à la galerie en passant par les chambres. La tour nord, de forme
carrée et à trois niveaux est la plus ancienne ; elle pourrait remonter au
XIIIe siècle. De part et d'autre de la salle haute se trouvaient deux
galeries transversales en bois distribuant les chambres latérales. La
galerie, chauffée par une cheminée, permettait également l'accès à une étuve
ou "bain de vapeur" aménagée dans la tourelle d'angle sud à la discrétion du
seigneur (cette dernière est chauffée par un four et alimentée manuellement
en eau par les domestiques de l’extérieur via un petit bassin) . Selon Gwyn
Meirion-Jones, la galerie se prolongeait sur l'extérieur en hourd ou
"galerie d'agrément".
Le manoir a évolué jusqu'au XVIIe siècle : vers 1660, on construit la tour
sud qui comprend au rez-de-chaussée une chapelle. De lourds travaux de
restauration sont entrepris par Vincent Le Chevoir notamment par l’insertion
d'un plafond dans la salle haute par deux charpentiers de Plouer ou encore
la réfection de la maçonnerie. Si la salle basse devient salle à manger, la
salle haute devient le salon. A partir de la fin du XVIIe siècle, le manoir
semble être désaffecté : il devient résidence secondaire de Marie-Jeanne Le
Chevoir qui habite le manoir de Bonabry à Hillion puis à Lamballe. Le manoir
est restauré au XVIIIe siècle pour Jean du Bouillé-Turquant, marquis de
Resnou sous la direction de Gilles Ranou, "architecte et entrepreneur de
bâtiment". Le domaine est ensuite abandonné à un métayer ou à un fermier. Le
manoir de Coadélan a malheureusement connu un incendie en 1988 qui a
détruit une partie de la charpente de la tour orientale. Il a été restauré
par la famille Riou avant de passer entre les mains de la famille Francès
qui le possède toujours au début du XXIe siècle.
Éléments protégés MH : le manoir de Coatelan dans sa totalité : inscription
par arrêté du 22 janvier 1927.
manoir de Coatelan
22140 Prat, propriété privée, ne se visite pas.
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